Pourquoi l’abeille fait-elle du miel ?
La plupart des insectes se contentent de consommer le nectar des fleurs, les insectes sociaux le stockent parfois collectivement. Ainsi les bourdons, qui sont aussi des abeilles sociales, ont ce que les entomologistes appellent un « pot à miel » dans leur nid. Cependant, le nectar qui y est stocké, n’est pas conservable longtemps. Il va fermenter très vite. Mais le nid de bourdons va mourir avant l’hiver et seules les nouvelles reines fécondées, les fondatrices de l’année à venir, vont s’enterrer pour résister au froid et passer l’hiver. Seules les abeilles mellifères dont la colonie entière doit passer l’hiver, auront besoin de provisions qui ne fermenteront pas. C’est pourquoi elles, et elles seules, transforment le nectar des fleurs en miel, afin d’en faire un produit durable.
Quels sont les animaux qui hibernent ?
L’imagerie populaire cite immédiatement l’ours, le gros ours brun ou noir, mais il en est d’autres, surtout dans les pays froids ; d’autres mammifères d’abord, comme le blaireau. En breton, on prétend même que le blaireau ronfle, à cause d’une assonance entre les deux mots (roc’hal evel ur broc’h : ronfler comme un blaireau). S’agit-il d’une véritable hibernation cependant, car la température du corps de l’ours comme du blaireau ne descend que de quelques degrés ? L’ours d’ailleurs doit continuer à s’occuper de ses petits en hiver et si on le dérange, il se « réveille » instantanément, ce qui n’est pas le cas des vrais hibernants. Mais les ours ne mangent pas, ne boivent pas, n’excrètent pas durant l’hiver ! Par comparaison, la marmotte des Alpes et ses cousines nord-américaines vivent une véritable hibernation qui va durer six mois, dès octobre jusqu’en avril. La température interne de l’animal chute de plus de trente degrés, passant de 37 °C à 5 ou 6 °C ! Les battements cardiaques diminuent aussi et les mouvements respiratoires deviennent à peine perceptibles. Pourtant, la marmotte sortira plusieurs fois de ce sommeil au cours de l’hiver mais ce sera pour se rendormir presque aussitôt. A quoi sert cette énorme dépense d’énergie, puisque l’animal n’en profite pas pour se nourrir ? Peut-être simplement à remettre en marche la machine et vérifier qu’elle continue de fonctionner. Une léthargie totale et sans interruption de six mois conduirait peut-être à la mort ! Si l’écureuil arctique hiverne bien, plongé dans un état catatonique et à une température record de moins 2, moins 3 °C (sans geler ! record toutes catégories pour les mammifères !), l’écureuil roux d’Europe, (là où l’écureuil de Corée ne l’a pas éradiqué), continue de vivre sa vie, grâce aux nombreuses provisions qu’il a ramassées ou camouflées un peu partout. Comme le trappeur dans sa cabane ou comme le peuple d’abeilles dans son nid. Il hiverne mais n’hiberne pas. Pas comme les chauves-souris, les grosses comme les minuscules, qui vont « dormir » plusieurs mois dans leurs trous.
Il n’y a pas que les mammifères qui hibernent. Rainettes, salamandres et des tas d’insectes utilisent la même méthode pour résister au long hiver : trouver un abri suffisant et abaisser leur métabolisme. Les insectes ont deux méthodes contre le gel. Soit ils résistent au gel, soit ils l’évitent. Les biologistes parlent de freeze tolerance et de freeeze avoidance. Ceci, aussi bien comme adultes qu’au niveau larvaire.
Certains insectes donc vont résister au gel en produisant une protéine antigel qui va inhiber la formation de cristaux de glace dans leurs cellules (et dans leur système digestif où ils ne laissent rien qui puissent servir de base à une quelconque cristallisation) mais également en produisant naturellement du glycérol, un autre type d’antigel qui empêche lui aussi la formation de cristaux de glace. En plus, l’insecte en hiver subit une certaine déshydratation, le pourcentage d’eau de ses cellules peut diminuer de moitié, passant de 60 à 30 %.
Il pourra ainsi assécher partiellement certains de ses fluides corporels mais aussi abaisser le point de gel d’autres jusqu’à les « vitrifier » en évacuant l’eau de ces fluides et en abaissant ainsi la température de gel du liquide restant. Les expériences de laboratoire ont montré des insectes résistant à des températures de moins 150 °C (certains écotypes de Cucujus clavipes, un coléoptère qu’on trouve sous l’écorce des arbres depuis les régions arctiques jusqu’en Indiana, au centre des États-Unis ). Ah, les insectes, quelle merveille !
Simonpierre DELORME ()
Compléments :
– Elisabeth Manning « The Long Sleep. Which animals hibernate ? » (www.adfg.alaska.gov)
Publié dans Abeilles & fleurs N° 775 de Juillet-Août 2015